JOYEUX NOËL A TOUS!!!!
1
Immobilité
Vendredi 9 juillet
00h03,
Les Haies, Plélan-le-Grand, Bretagne, France
Le choc provoqué par la
déflagration lui occasionnait des bourdonnements d’oreilles. Ses yeux lui
piquaient et semblaient englués dans un liquide collant.
Probablement du sang.
Son cœur
s’emballa lorsque deux mains vigoureuses s’enfoncèrent dans ses épaules et
le secouèrent avec vigueur. Une voix lointaine résonna. Semblait l’appeler.
Comme familière…
Ce n’est qu’au moment où ses
paupières se soulevèrent, qu’il le distingua dans la pénombre.
- Gall ! Gall !
hurlait Gauvain, le visage horrifié. Tu vas bien ? Rien de cassé ?
Totalement désorienté, allongé
sur le gravier, Galaan revenait progressivement à la réalité quand soudain, une
terreur sourde le frappa de plein fouet.
Gen !
- Gen… souffla-t-il, baignant
dans l’angoisse absolue et complètement déboussolé. Gen ! répétait-il
inlassablement en cherchant à se relever, en proie à une panique sans
précédent.
- Elle est là-bas. Julie est
près d’elle. Vas-y doucement. Tu as mal quelque part ? Tu es blessé ?
- Il faut que je la voie… Il
faut que je la voie ! finit-il par crier en effectuant quelques pas
chancelants.
***
Se redressant à son tour,
Guillaume observa la scène de loin. Il n’avait pas imaginé qu’un tel impact
soit possible, qu’une telle déflagration se produise. Il considéra le gîte, du
moins, ce qu’il en restait, soit à peine un mur dressé, vacillant, prêt à
s’effondrer à tout moment. Le corps de logis avait été également touché, mais
les dégâts ne semblaient pas aussi considérables que l’aile adjacente, dont il
ne subsistait quasiment plus rien.
C’est au moment où il retrouva
son équilibre précaire qu’il les aperçut.
- Bordel ! Mais qu’est-ce
qu’ils foutent là, ces connards ?
Une rage sournoise s’empara de
lui. Il cogna de toutes ses forces sur le tronc de l’arbre derrière lequel il
s’était réfugié, et rugit les mâchoires et les poings serrés.
- Bordel de merde !
Son plan venait d’échouer…
En tout cas, ce qui concernait
la tâche à laquelle Morgane l’avait assigné. Parce qu’à voir le corps de la
jeune femme étalé sur le sol et les cris de désespoir de l’autre abruti de
service, il pouvait ressentir une vague de chaleur sombre, lui envahir les
veines.
Il observa la scène encore
quelques secondes, se délecta de ce spectacle ô combien jouissif et retourna
vers sa voiture. Il fallait absolument qu’il décampe de là !
***
- Oh, mon Dieu, Jul, dis-moi
qu’elle est vivante ! la supplia-t-il horrifié en tombant à genoux à côté
de son amante gisant au beau milieu des décombres.
- Elle est grièvement blessée.
Il faut la conduire immédiatement chez Tante Vie.
- Non ! Appelez une
ambulance ! s’insurgea-t-il en se penchant vers Gen totalement
inconsciente, dégageant de ses doigts fébriles et tremblants les mèches de
cheveux collées à son visage ensanglanté.
Très vite, il jaugea son corps
et établit un premier constat. Couchée sur le dos, elle présentait de multiples
plaies ouvertes sanguinolentes ainsi que de nombreuses brûlures qu’il pouvait
distinguer à travers ses vêtements déchirés.
- Mon Dieu, mon amour, émit-il
en contemplant l’étendue du désastre, s’inclinant encore vers son visage pour
l’envelopper de ses mains. Non… Non !
- Il n’y a plus une minute à
perdre, ordonna Gauvain, agité. On la conduit chez Tante Vie !
- Gauv… Elle est salement
amochée, lui fit remarquer son cousin en relevant vers lui un regard chargé de
détresse.
- Justement ! Et l'on a
intérêt à se magner le cul ! Edwin se charge des proprios. Les secours ne
vont plus tarder, maintenant, et si l'on reste ici trop longtemps, ils vont
l’embarquer.
- Tante Vie… Est-ce qu’elle
saura…
Les larmes entravant sa gorge
nouée par la vive émotion l’empêchèrent de poursuivre. Gauvain se pencha vers
lui et le ton empli de chaleur, chercha à le rassurer :
- Elle est la seule qui puisse
la sauver sans qu’aucune trace ne subsiste. Si on l’emmène à l’hosto, ça
prendra des mois. N’oublie pas qu’il ne vous reste que très peu de temps !
Perdu, indécis, Galaan se
contenta d’opiner, s’en remettant totalement à Gauvain et Julie qui prirent
directement la tête des opérations.
- Je vais la porter,
lança-t-il en glissant aussi délicatement que possible ses bras sous le corps
abîmé et contusionné de Gen.
Les sièges arrière rabattus en
couchette leur permirent d’allonger la jeune femme gémissante et de laisser
Galaan s’installer à ses côtés. Gauvain s’assit derrière le volant et Julie
prit place à sa droite, la mine grave et soucieuse. Une seule œillade leur
suffit à exprimer l’intense soulagement qu’ils éprouvaient à l’idée d’avoir
frôlé la catastrophe. Toutefois, même si Gen et Galaan s’en étaient sortis
vivants, rien n’était encore gagné.
Le Toyota Land Cruiser démarra
et s’éloigna à vive allure dans la nuit. En chemin, il croisa une ambulance,
suivie de près d’un premier véhicule de pompiers…
***
00h36,
Telhouët, Bretagne, France
Le 4x4 freina brutalement dans
l’allée et quelques secondes plus tard, les garçons sortaient du véhicule en
transportant le corps inanimé de Gen à l’intérieur.
- Vite ! À
l’atelier ! leur ordonna Tante Vie qui les précéda dans la pièce afin
d’accueillir la blessée sur le banc de massage.
Ensuite, elle se saisit du
paquet remis par Gudwal, le déballa en toute hâte et en sortit un pendule
qu’elle remit aussitôt à Julie.
- Ceci est pour toi. Il est
l’outil indispensable dans le processus de guérison que tu entameras avec tes
patients. Il sera le prolongement de ta main, décelant ainsi avec exactitude
les ondes négatives et les plaies à soigner.
Émue, Julie l’accueillit dans
le creux de sa paume avec précaution et l’examina attentivement : au bout
d’une chaînette en or pendait une goutte claire en cristal translucide,
s'achevant en une longue pointe, et qui au contact de sa main, se mit à
blanchir. De fins nuages se matérialisèrent, semblèrent flotter avant de se
mettre à tournoyer sur eux-mêmes avec une rapidité déconcertante.Ce n'est qu'à
l'approche du corps de Gen qu'une teinte violacée colora le cœur du pendule.
- Nul doute là-dessus :
il s’agit bien de celui qui t’était destiné.
Julie releva ses prunelles
affectées vers Viviane.
Merci, murmura-t-elle, les
larmes coincées dans la gorge.
- Maintenant, soignons-la.
Gauvain, va nous chercher une bassine d’eau chaude, s’il te plaît !
Galaan, pendant que Julie et moi établissons un premier diagnostic, tu vas la
débarrasser de ses vêtements et nettoyer ses blessures. Tu iras plus vite en
les découpant.
Ce dernier demeurait figé, les
yeux horrifiés rivés sur sa compagne, les bras pendant le long de son corps.
Une main rassurante vint lui
frotter l’épaule et la voix de Tante Vie s’insinua dans son esprit. Douce et
apaisante.
- Allez… Garde l’esprit clair
et objectif. Elle a besoin de toi, mon grand. À moins que tu ne préfères
sortir ?
- Non. Non, se reprit-il en
secouant la tête et essuyant une larme intruse du plat de sa paume comme le ferait
un enfant. Je veux rester pour la soigner. Mon Dieu… Elle est si… vulnérable…
acheva-t-il la voix tremblante.
- Elle est forte !
Crois-moi ! Elle semble grièvement blessée, mais son pendentif la protège
d’une mort certaine.
***
Une grosse heure plus tard,
Telhouët, Bretagne, France
Au cours des soins qui avaient
suivi, Gen avait été maintenue endormie par de puissants sédatifs. Julie, sous
la tutelle attentive et vigilante de Tante Vie, lui avait découvert une
fracture du bassin, qu’elle avait ensuite ressoudée avec précision, sous le
regard éberlué de Galaan. Ce dernier s’était chargé de dévêtir entièrement sa
compagne et de nettoyer les plaies et les brûlures dont elle était recouverte.
Par la suite, il avait enduit chacune d’elles de cette même crème verte au haut
pouvoir désinfectant et cicatrisant, appliquée quelques jours plus tôt sur son
propre flanc. L’inquiétude ne l’avait pas quitté et avait guidé ses gestes
minutieux et doux sur la peau meurtrie de Gen. Pourtant, bien malgré les
nombreuses blessures qui la parsemaient de toute part, il ne pouvait s’empêcher
de la contempler d’un œil admiratif, subjugué par tant d’harmonie. Rien de tout
cela n’avait altéré sa beauté. Il la trouvait tout simplement magnifique.
- Maintenant que nous en avons
terminé, débuta Tante Vie, nous allons installer Gen en haut. Recouvre-la d’un
drap de bain, Galaan, et monte-la.
- Je la coucherai dans ma
chambre, décréta-t-il d’emblée, la prenant et la soulevant déjà dans ses bras.
La Dame du Lac sourit.
Décidément, ces deux-là devenaient inséparables.
- Combien de jours seront
nécessaires à sa guérison ? demanda-t-il à Julie tandis qu’il emmenait la
jeune femme à l’étage et la plaçait sur son lit.
- Il est préférable de la
garder endormie jusqu’à demain pour la préserver de toute souffrance inutile.
Il faudra compter deux jours pour la cicatrisation complète des brûlures et une
semaine pour la fracture du bassin. Elle pourra se tenir debout dès demain et
marcher après-demain, en fonction de l’évolution de la contusion. Par contre,
les galipettes sont à proscrire pendant quelques jours, le temps que son bassin
se remette. Je ne plaisante pas, Galaan. Tout effort pourrait compromettre une
grossesse future et anéantir ses chances d’être mère un jour.
Il opina en silence, l’expression
solennelle, borda son amante et lui caressa le front dans un geste tendre,
étouffant sous l’assaut d’un nouvel élan d’amour face à cette femme dont il ne
pouvait désormais plus se passer et pour laquelle une vive angoisse se logeait
au cœur de sa poitrine.
- Laissons-la se reposer,
maintenant. Tu vas m’accompagner en bas pour que je puisse te soigner.
- Me soigner, répéta-t-il
machinalement, incapable de détourner son attention du corps inanimé de Gen. Ça
peut attendre. Elle a besoin de moi.
- On voit que ça fait un
moment que tu ne t’es pas regardé dans une glace. Tu es blessé et il faut
désinfecter tout ça.
- Tout va bien, pour moi. Ne
te tracasse pas. Je ne veux pas la laisser seule.
Quel têtu, celui-là !
Julie leva les yeux au ciel et
poussa un profond soupir.
- Bon. Eh bien! Dans ce cas,
c’est moi qui monterai avec les pansements, marmonna-t-elle en quittant la
pièce.
***
- Comment va-t-elle ?
tonna la grosse voix de Gauvain dans le dos de Julie tandis que celle-ci
pénétrait dans l’atelier.
- Ça devrait aller. Brûlures
superficielles et fracture du bassin. Compte tenu du choc de l’explosion, elle
s’en tire plutôt bien !
- Ils étaient tous les deux
protégés. Heureusement.
Il l’enlaça par la taille et
posa son menton sur son épaule.
- Merci pour elle. Tu as été
géniale… Petite Fée.
La tête reposant contre lui,
elle sourit.
- Je ne pouvais pas laisser ma
meilleure amie dans cet état. Et puis, je n’étais pas toute seule. Galaan nous
a bien aidées. Il s’est occupé de panser toutes ses plaies. Il s’est montré
très efficace.
- N’oublie pas qu’il a
l’habitude de prodiguer des soins même si ça se limite à des manips de kiné.
- C’est vrai, reconnut-elle en
se tournant pour lui faire face, mais il est resté particulièrement objectif
alors qu’il s’agit de sa compagne. Il a
fait preuve d’un calme olympien. C’était assez incroyable ! Quelle
maîtrise !
- Sa compagne, répéta-t-il
pour lui-même, sans la quitter des yeux. Et nous deux, Petite Fée… Je sais que
le moment est mal choisi, mais… où en sommes-nous ?
D’un doigt songeur, elle
effleura ses lèvres fournies.
- Je ne sais pas,
Gauvain.
- Ce qui s’est passé hier
soir… Ça signifie quelque chose, non ?
- Sans doute.
Était-ce le moment approprié
pour lui livrer les sentiments qu’elle nourrissait à son égard ?
- Et toi ? Que ressens-tu
exactement ? se risqua-t-elle, le cœur battant comme un tambour.
- Je te l’ai dit. Je te trouve
spéciale… Je tiens à toi.
- Julie, les interrompit Tante
Vie qui apparut à cet instant, nous avons épuisé les réserves de baume
cicatrisant. Je dois me rendre à Avalon pour en trouver.
M’accompagneras-tu ?
- Laissez-moi juste le temps
de soigner Galaan.
- Très bien. Nous reviendrons
en début d’après-midi. De ton côté, Gauvain, assure-toi que Gen ne manque de
rien. Ne la laissez pas se réveiller trop longtemps. Elle doit dormir le plus
possible. J’ai fourni à Galaan le remède qui prolongera son sommeil réparateur.
***
Assis
sur une chaise face au lit sur lequel était allongée Gen, Galaan tentait de
s’éclaircir les idées quant à l’évènement survenu au cours de la nuit. Que
s’était-il produit, exactement ? Qu’est-ce qui avait pu causer cette
explosion ? Était-ce dû à une fuite de gaz ?
La
déflagration s’était produite au moment où elle avait actionné l’interrupteur
pour éclairer la chambre… C’est en tout cas ce qu’il avait entraperçu, avant de
se retrouver violemment projeté au sol.
Contrairement
à Gen, il ne s’en sortait qu’avec quelques petites plaies sur le visage et sur
les bras. L’horrible vision de son corps déchiqueté s’imposa une fois encore à
lui. Le ventre noué, il se pencha vers l’avant, les coudes sur les genoux, une
main se noyant dans ses cheveux. Il avait bien failli la perdre pour toujours,
cette fois. Heureusement qu’ils étaient protégés.
Protégés…
Était-ce
possible que cette tragédie ait été provoquée par un acte criminel ?
Est-ce que Morgane avait commandité ce drame, destiné à…À quoi exactement ?
D’après
Viviane, tout ce que cette sorcière escomptait, c’était de se l’approprier,
lui. Or, s’il ne s’était pas éloigné d’elle, ils auraient été touchés tous les
deux… À moins que quelqu’un n’ait été chargé d’autre chose…
La
protection de leur médaillon les préservait de la mort, leur assurant alors une
certaine invulnérabilité. Et si le but de la manœuvre était de s’emparer de
leurs pendentifs, afin de les affaiblir ? Dans ce cas, cette timbrée était
prête à tout, ce qui changeait considérablement la donne.
Une
autre question le taraudait. Fallait-il prévenir la police ?
Pour
ce qu’il en savait, celle-ci n’avait su établir de constat précis lors de
l’accident ayant coûté la vie à leurs parents, quinze ans plus tôt. Était-elle
de mèche avec cette femme, voire sous son influence ? Avait-elle suivi
toute la procédure de façon objective et scrupuleuse ? Pouvait-il
seulement accorder sa confiance aux forces de
l’ordre ?
Quelques
coups frappés doucement sur la porte le dévièrent de ses pensées.
- Je
peux entrer ?
La
tête joufflue de Gauvain passa, une lueur inquiète voilant néanmoins son regard
d’ordinaire jovial et mutin.
-
Viens…
Gauvain
saisit une chaise et vint se poser à côté de son cousin.
- Je
vois que Julie t’a transformé en géant vert. Bienvenue au club.
Galaan
afficha un sourire qui n’atteignit pourtant pas ses yeux.
-
Elle a soigné ce qu’elle qualifie « ma belle gueule ». Mais bon… De
là à ce que j’enfile le collant assorti… Je te laisse le monopole de Shrek,
mec !
-
Très drôle.
-
Elle est partie ?
-
Ouaip. Avec Tante Vie. À Avalon.
-
Avalon, soupira Galaan exténué. J’ai encore du mal à réaliser… C’est tellement
déroutant.
-
Comment te sens-tu ?
-
J’essaye de faire le tri. L’adrénaline se dissipe. J’ai eu très peur pour elle.
J’ai cru…
Sa
voix se brisa à la simple idée de ce qui aurait pu advenir de sa compagne. Il
avait eu si peur de la perdre.
-
Mais bon… Gen va surmonter tout ça, reprit-il, le ton plus posé.
-
J’en suis sûr, confirma l’autre en lui décochant une bourrade amicale à
l’épaule.
- Je
tenais à vous remercier tous les deux. Vous êtes intervenus si… Mais au
fait !
Les
sourcils froncés, Galaan s’interrompit net et se tourna vers Gauvain :
-
Mais au fait... Pourquoi étiez-vous déjà présents? Ça venait de se
produire !
- On
nous a prévenus. Vous veniez de partir depuis… Oh… Je dirais vingt bonnes
minutes, qu’un mec m’a appelé.
-
Quel mec ? Qui était-ce ?
-
Aucune idée. Le numéro était masqué. Il avait un accent… Genre allemand, tu
vois ? Mais je ne sais rien d’autre. Impossible de le joindre pour le
remercier. Du coup, j’ai essayé de te contacter, mais ton téléphone était
éteint.
- Je
l’avais coupé, après un appel de Valérie. Je voulais passer une soirée relax...
-
Relax… Ouais, c’est une façon de voir les choses. Elle t’a encore emmerdé ?
Galaan
jeta un regard désapprobateur vers Gen avant de revenir le poser sur son
cousin. Il ne s’agissait pas de s’étaler sur le sujet devant elle, même
endormie.
-
Disons que… Je ne voulais pas être dérangé. Cette soirée était trop importante
pour moi… Pour nous. Et puis, avec Gen… Je voulais passer à la vitesse
supérieure sans être interrompu par qui que ce soit.
-
Alors ça y est ? s’exclama l’autre d’une voix toutefois étouffée et le
visage éclairé, vous avez enfin conclus ? Putain, mec ! J’ai bien cru
que tu ne te déciderais jamais !
Galaan
secoua la tête, un sourire bravant son expression grave.
- On
dirait bien…
Sa
mine s’obscurcit aussitôt et il fit part de ses réflexions à son cousin :
- Je
ne pense pas que l’explosion était accidentelle.
Gauvain
se carra contre le dossier de sa chaise, se croisa les bras sur le torse et
fronça les sourcils.
- Je
pense exactement la même chose. Morgane ?
Galaan
opina.
-
C’est à elle que je songeais.
-
Dans ce cas, il va falloir vous montrer extrêmement prudents. Cette déjantée
n’a pas l’air de reculer devant quoi que ce soit.
- Si
la protection de nos pendentifs possède une telle portée, ce n’est pas pour
rien.
-
Dès que Julie reviendra d’Avalon, nous irons tous les trois rencontrer les
proprios et les interroger par rapport à ce chauffagiste de mes deux qui est soi-disant venu réparer ce putain de
chauffe-eau. J’aimerais aller lui rendre une petite visite de courtoisie.
- Et
dire que les filles ont tout perdu…
- Ça
les forcera à loger ici. Hors de question qu’elles posent leurs fesses ailleurs
que chez nous.
Galaan
lui adressa un regard complice et conspirateur.
-
Tout à fait d’accord.
-
Bien…
Gauvain
s’étira longuement et bâilla bruyamment.
- Je
vais me pieuter. La chambre du fond est libre, si tu veux.
- C’est
gentil, mais je vais rester près d’elle.
- Au
cas où tu ne l’aurais pas remarqué, c’est un lit à une place!
- Ne
t’inquiète pas pour ça.
Son
cousin se leva et s’avança vers la porte. Quand vint le moment de sortir, il
fit volte-face et tonna de sa voix rauque et menaçante :
- Un
conseil… Ne pars plus courir seul. Après ce qui est arrivé cette nuit, j’en
déduis que vous êtes en perpétuel danger. Tant que cette folle furieuse ne sera
pas calmée, genre après le 1er août,
vous aurez intérêt à rester vigilants.
Galaan
acquiesça malgré tout.
- Et
venir courir avec moi… C’est envisageable ?
- Tu
veux vraiment ma peau ?
- Je
dois bouger, Gauv…
-
Bon. Alors si c’est une question de survie… Je suppose que je pourrais faire un
effort. Putain ! Aller courir, grogna-t-il en quittant la pièce. Putain de sportif ! grommela-t-il
alors qu’il refermait la porte de sa chambre.
***
Au même moment,
Val sans Retour, forêt de Brocéliande, Bretagne, France
Il déchira l’épaisse brume qui
dissimulait l’imposant portail en fer forgé délimitant l’entrée du domaine et
avança le 4x4 Mercedes noir dans l’allée. Une fois le véhicule garé devant la
demeure, il en descendit et en franchit le seuil. Il traversa tout d’abord un
vaste hall aux plafonds remarquablement hauts, dépassa une première porte et
gravit un majestueux escalier central desservant un palier. À l’étage, il
emprunta un long couloir dont les murs lambrissés en chêne étaient ornés de
nombreux tableaux d’époque. Une épaisse moquette bordeaux aux minuscules motifs
de fleurs de lys dorées accueillait ses pas feutrés. Lorsqu’il aboutit enfin à
une porte aux immenses battants de chêne, il frappa. Il pénétra ensuite dans
une pièce spacieuse, à la décoration analogue. Au centre, se dressait un
élégant bureau haut sur pieds, auquel était attablée une femme à la beauté
stupéfiante.
- Bonsoir Morgane.
A suivre...